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Avant projet pour le film de la série des variations Goldberg de J.-S. Bach, œuvre peint par A. Jomelli.

Résumé :

André Jomelli, Artiste-peintre, a réalisé à partir des variations Goldberg de J.S. Bach trente-deux toiles. Ce fut un travail long et complexe, fruit d’une rencontre artistique intense.

Notre projet est de témoigner de cet œuvre singulier.

Afin de respecter l’originalité de ce travail, nous avons décidé, plutôt que de réaliser un documentaire, de créer un dispositif cinématographique, fidèle à l’idée de variation ayant inspiré J.S. Bach puis André Jomelli.

Le film se composera d’une vingtaine de séquences ouvrant la voie à l’expression d’une douzaine de personnalités (peintre, comédien, maître-verrier, psychanalyste, amateur d’art et philosophe, etc.).

L’idée que nous leur avons exposée est assez simple. Nous leur demandons de se rendre dans l’atelier du peintre. Une fois sur place, nous leur proposerons de faire connaissance avec l’œuvre, puis de choisir une toile. Pour faire suite à cela, ce qui leur sera demandé, sera de faire partager au public, par l’entremise d’une caméra et d’une équipe professionnelle, le parcours de leur regard, mais aussi de rendre visuelle leur émotion, le sens comme la transcendance créée en eux par l’œuvre.

Toutes ces personnalités sont de grands amateurs d’images et de cinéma. La qualité de leurs interventions ne fait pas de doute. L’accompagnement par l’équipe de B.K.E. garantira la réussite de la mise en image. Le tout sera placé sous le regard attentif d’André Jomelli et de Jean-Louis Escarret.

Ce film aura une durée de 52 minutes.

Qui est André Jomelli ?

« L’œuvre de Jomelli n’est pas de celles que l’on découvre à pas comptés en dénombrant les petits cailloux du sentier. D’emblée, il y a déjà près de trente ans, il vous flanquait sa peinture en pleine figure tant elle est généreuse, intense, à prendre ou à laisser. Les sources étaient évidentes. Matisse bien sûr. Il y avait beaucoup d’amour, un amour fou de la couleur, de l’énergie à revendre, l’espace à conquérir. Tant de santé refuse la parcimonie, elle s’exprime dans le geste, large, jeté qui s’éclate sur la toile et tant pis s’il éclabousse. Ainsi se proclame la joie. Mais le tableau de chevalet n’était guère à sa dimension physique ; il lui fallait du mur et il a fait des murs pour assumer sa passion. L’espace mural permet aussi le combat où se heurtent, se déchirent, de violentes tensions. Le mur fut le champ clos de la bataille d’où émerge dans une lumière parfois confuse le sentiment de la paix. Le temps qui passe règle les énergies sans pour autant les brimer, pour mieux les éprouver et mieux trouver la justesse et l’exigence intérieure qui les mènent. L’espace actuel de Jomelli demeure invarié, mais se mesure aux dimensions exactes de la toile offerte qu’il bouscule là où se poursuit le rêve, l’exaltation des verts pâturages, quand le chant devient cantate, hymne à la joie. Alors les intuitions du cœur font saisir les vérités profondes des êtres et le regardant, médusé, ébloui, a le sentiment – faux mais vrai – qu’il va approcher, peut-être atteindre, la plénitude d’un moment d’éternité. En plein lyrisme, comment demeurer comptable exact de sa jubilation, peser, soupeser, estimer, mais je sais que je ne m’égare pas. Jomelli est livré. Son aventure lui échappe ; ce n’est plus qu’un problème de société. Sans rapport avec l’art…/… » François Mathey

Le projet :

Cela fait plusieurs années qu’André Jomelli s’est investi dans ce très ambitieux projet. Dés que s’est esquissée l’œuvre, la pensée d’un travail connexe à sa création lui apparut comme un prolongement artistique très excitant. Photos, cinéma, vidéo étaient souvent convoqués en complément d’une exposition des 32 toiles.

La longue connivence artistique liant André Jomelli et Jean-Louis Escarret s’est naturellement imposée comme ferment et argument du travail à venir.

Complices dès l’année 2000, ils avaient travaillé en 2001 et 2002 sur un opéra réalisé de concert avec un comédien (Raphaël Bianccioto) un musicien ( Jean-François Vrod) et une choriste (Nathalie Duong) pour des patients du CATTP de Vigneux rattaché à l’Hôpital sud Francilien de Corbeil-Essonnes.

Depuis leurs échanges n’ont pas cessé.

Quand les premières toiles des variations Goldberg ont commencé d’être réalisées, l’idée d’une ballade artistique au cœur de l’œuvre - en écho au travail de peinture qui à sa manière avait su créer un lien de connivence étroit entre la musique et la peinture - a germé. Il s’agissait d’installer un nouveau rapport, mais cette fois entre la peinture et le cinéma.

Le fait de suivre la réalisation au long court aurait pu être séduisant, mais André Jomelli avait autre chose en tête. Peintre de la citée, auteur de créations monumentales, A. Jomelli a toujours mis son œuvre au centre d’une interrelation dynamique entre le public et ses réalisations. Ce qu’il nous propose, c’est une fois l’œuvre du peintre accompli, de céder, à quelques personnes sensibles à ses recherches comme à son œuvre, la parole, le temps d’un échange, échange dont les mots ne seraient pas l’outil de la médiation, mais l’image.

C’est à partir de cette proposition que notre projet a pris son élan. De nombreuses consultations, suivies d’encouragements, nous ont déterminé à nous investir dans ce projet.

Aujourd’hui, les toiles sont terminées, des contacts prometteurs sont engagés en vue d’une exposition. Nous avançons. Si tout suit son cours comme nous le souhaitons, le tournage devrait avoir lieu au mois de juin de cette année.

***

Les variations Goldberg, œuvre pour clavecin, composé par Jean-Sébastien Bach, sont d’une richesse extraordinaire de forme, d’harmonie, de rythme, d’expression et de raffinement technique. L’ensemble est basé sur une technique contrapuntique inégalable. C’est l’un des sommets de la forme "thème avec variation" et l’une des pièces les plus importantes écrites pour le clavier.

Cette œuvre à déjà inspiré de nombreux auteurs, que ce soit au cinéma, « Le silence d’Ingmar Bergman “ ou en littérature ‘’ les variations Goldberg de Nancy Huston / liberty Street de Bertrand Puard ‘’. Mais à notre connaissance, aucun peintre ne s’est à ce jour saisi des variations pour faire œuvre.

André Jomelli, '' peintre non figuratif ‘’ comme il aime se définir, a choisi depuis plusieurs années de peindre ce qu’il appelle des séries. Selon lui : ‘’ Le grand danger de l’art abstrait, est de tomber dans le décoratif, s’il n’est pas soutenu par un thème, par une parole initiale et initiatique ‘’.

Et c’est bien la puissance de ce travail, que cette suite de variations qui se conclut par une série. Il précise : ‘’J’aime qu’une mystérieuse relation s’établisse entre les peintures. Chacune est unique, certes, mais elle n’est pas sans rapport avec celle qui précède et celle qui la suit… comme thème et variation, c’est très musical…’’

Il y a dans cette suite de variations, une harmonie construite autour d’une quête essentielle de sens, sens qui n’est pas, paradoxalement pour une peinture, du côté du seul visible, mais de celui de ‘’ l’inclus ’’, de l’immanence. Et ce mystère que déplie l’œuvre, ce mystère contenu, mais aussi libéré par la peinture, est en fait l’expression de la relation qui se noue grâce à la toile entre celui qui la contemple et le monde dans lequel il se trouve.

Cette harmonie, si jubilatoire dans la contemplation de la suite des 32 œuvres, ne peut pas rester confinée dans le secret des galeries. D’abord, parce qu’elle est mouvement, qu’elle induit une circulation, mais d'autant plus qu’elle demande un regard actif, une subjectivité en quête de rencontre.

Cette nécessité du dehors, nul doute qu’elle soit la continuation, sous une forme nouvelle, de cet art déplié pour l’humanité, qui est l'art des fresquistes, des sculpteurs monumentaux, de tous ces artistes qui ont la volonté de décrocher l’art des cimaises où il somnole, se pavane parfois, dans le secret regard de quelques visiteurs, pour l’ériger dans l’espace public.

Car cette peinture est arc en ciel. Il lui faut l’espace, le temps, l’eau, la lumière, l’endroit juste de la contemplation pour déployer son mystère et sa force, sa fugacité aussi.

Les toiles d’André Jomelli, sont de cette énergie là ; d’une modestie incommensurable. Paradoxe de la révélation qui cherche à préserver, dans l’énonciation, la force de ce qui l’emplit, sans perdre au passage à la forme, l’amplitude de son existence apodictique.

Venir à la rencontre, certes, mais pas à n’importe quel prix. En tout cas pas celui du confinement, du rétrécissement. Si une variation est la somme d’unités homogènes, chacune étant intrinsèquement libre de l’autre, autonome en quelque sorte de vivre par delà ce qui la lie et la sublime en même temps, il est d’évidence que le tout englobe la puissance unitaire alors que l’unique se languit du tout. Se languit, certes, mais aussi l’appelle, l’induit, demande à faire corps. Se déplie pour devenir cette somme dont il est le maillon unique, indispensable, mais in-fini tant que la chaine n’aura pas bouclé son périple. Tant que ne seront pas entrés en synergie les mouvements intimes qui engagent le soi vers l’autre, en son aboutissement.

Voir cette œuvre, nous invite à rentrer dans le mouvement. Il y a donc dans ce travail une poussée novatrice. Poussée hors de (le mur, la cimaise, la galerie,) nous l’avons dit, mais aussi désir de réintégration, de re-faire corps, intuition de recréer le lien qui jointait le réel à sa source, à ses origines, pour en visiter une nouvelle fois les fondements.

Mais l’originalité ne le serait pas tant que cela, si elle s’arrêtait à cette monstration. Dans ce travail, le trois fait sens : la musique, la peinture, le regard. La musique, nous l’avons, c’est J.-S. Bach, la peinture également, celle de A. Jomelli, ce qui bouge, la variable disons, c’est la subjectivité du regard, la sensibilité de celui qui l’adresse et à qui l’œuvre parle. Autant d’œuvres que de vis-à-vis. Voila bien le projet, voilà ce dont nous voulons témoigner, expérience de la contemplation en mouvement, sorte de transsubstantiation par la rencontre dynamique de ce trois unitaire.

Quel rôle jouera donc le cinéma dans ce dispositif ?

Le cinéma, troisième élément de cette rencontre, joue dans cette réalisation un double rôle.

Le premier, de témoigner, sous le regard cinématographique d’une équipe de cadreurs professionnels et d’un réalisateur, du déroulement de l’événement.

Le deuxième, qui est au cœur du dispositif, a pour fonction de traduire le regard subjectif des artistes invités à ‘’visiter’’ les toiles.

Comment l’envisageons-nous ?

Tourné dans l’atelier du peintre, à Laroque dans les Cévennes, le film s’attachera à rendre compte de cet événement artistique et cinématographique, cela sous plusieurs angles.

L’idée source est de réaliser un espace vidéo dynamique et créatif qui viendra saisir et traduire la forme singulière née de cette rencontre entre l’œuvre et celui qui la contemple. Chaque personne conviée se verra confier une caméra avec laquelle il lui sera proposé de visiter la toile et de donner forme, par l’image, à son émotion artistique. Il va de soi qu’un travail d’approche, de discussion, de choix, et de signification des attentes respectives précèdera la réalisation proprement dite.

Notre projet met en place un dispositif étudié à fin de saisir par les mouvements du regard la subjectivité de chaque face à face, de témoigner du dialogue artistique qui se noue entre l’œuvre et son spectateur afin de donner une forme visuelle à ce double regard. L’homme regarde la toile qui s’offre à lui, mais au lieu de la confidentialité habituelle du rapport regardé/regardant, le trajet artistique et les émotions intimes catalysées par cette rencontre prennent une sur-forme, elles se réalisent aussi en une création cinématographique, expression du trajet de la contemplation et des émotions perçues.

Premier niveau de cette réalisation, à son tour mis en abyme par le travail d’un duo de cadreurs, attentifs aux événements liés à cette rencontre. Ces prises étant envisagées comme une ultime ouverture, un déploiement supplémentaire de l’œuvre dans l’espace humain et particulier de l’atelier contenant l’événement.